Un prêtre dans les camps

Jean Varnoux ou n° 63273

Le camp de Melk

Written By: CeMp

Le camp de Melk, en Autriche, à  80 km de Linz est destiné aux déportés qui doivent creuser des galeries dans une colline, à l’intérieur de laquelle il est prévu d’installer une usine de roulements à billes, nommée “Quartz”.

Du 21 avril 1944 (date de l’ouverture du camp créé  à l’emplacement d’une caserne) jusqu’au 15 avril 1945 (date d’évacuation vers Ebensee), le camp ne cesse de s’agrandir.

Le camp de Melk  est une annexe de Mauthausen. Les déportés subissent le même traitement que dans les autres camps: travaux forcés, coups, torture, exécutions arbitraires, humiliations, manque de nourriture, sous l’autorité de S.S. sadiques:

Notamment le Lagerführer Julius Ludolph. Il se montre très violent. Il se fait cependant manipuler par quelques déportés au péril de leur vie. Il fait partie des pires nazis du camp.
Gottlieb Muzikant est un infirmier S.S. N’ayant aucune compétence médicale (il est à l’origine peintre en bâtiment), il fait partie des «bourreaux»: le revier, sous sa direction, est un véritable mouroir.

Le plus grand crime que, personnellement, je puisse attribuer au régime S.S., ce sont les conditions d’existence des dysentériques. On trouvait des “cadavres” vivants, pesant vingt à trente kilos, peau et os, un coeur qui continuait à battre on ne sait pourquoi, du sang et des excréments qui coulaient  partout. Il régnait une odeur insupportable à laquelle on s’habituer après quelques instants de patience. Quatre-vingts, cent hommes marinaient dans cette sanie, quatre par lit à trois étages. De temps à autre une plainte, en général le silence dans l’attente bestiale de la mort.

Le crime de Muzikant ce n’est pas d’avoir tué quelques-une de ces “larves”, c’est d’avoir réduit à cet état, par des procédés sciemment préparés et en quelques jours, au pire quelques semaines, des malades de trente à quarante kilos fort bien “récupérables” tas de “Musulman” comme il disait, dont on ne pouvait plus rien tirer.

Un des cas les plus inhumains que l’on puisse reprocher à Muzikant fut la mort d’un Russe qui avait tenté de s’évader du train en revenant du travail. Il avait sauté du wagon les roues lui avaient coupé les jambes. Toute la nuit il resta dans la cave du Revier sans soins . Il mourut au matin après une nuit de gémissement et de cris.

Les S.S. avaient fait de l’infirmerie non pas un lieu de soins, mais de récupération. Les malades ne devaient pas être soignés. Dans quelques salles on les entassait à deux, trois ou quatre malades par niveau sur des chalits de quatre-vingts centimètres de large, à trois étages. S’ils guérissaient par hasard, ils revenaient au travail ; sinon c’était le crématoire.

Les kapos se comportent également avec sadisme. Voici une anecdote à propos d’un “bourreau” nommé Uly:

A l’usine Roggendorf, les “toillettes” étaient une tranchée d’environ dix mètres de long sur un mètre de large. De chaque côté, une poutre pour se poser… Il ne fallait pas y séjourner trop longtemps. Dur problème pour les dysentériques! Je vis un jour un camarade qui parraissait souffrir énormément. Uly, kapo de tout les travaux de la mine passant par là, lui adressa un sérieux avertissement. Quelques instants après, revenant avec une brouette, je vis ce pauvre hère, mort dans la fosse! Uly l’y avait noyé!

Comme à Mauthausen, les détenus jugés inaptes au travail sont soit exterminés au château d’Hartheim soit directemment à Mauthausen par une injection létale ou en entrant dans une chambre à gaz.
A l’approche de l’armée alliée et de la libération du camp en avril 1945, Muzikant extermine directement les détenus au revier d’une piqûre au coeur.

Les cadavres sont brûlés au four crématoire de Melk.

Le kommando de Melk est cerné d’une double clôture électrifiée, cette clôture est certes presque infranchissable, mais certains détenusi tentent une évasion. Rattrapés, ils sont punis de mort.

Dans le recoin sus-dit se trouvait une potence et en dessous un Russe perché sur trois tabourets (deux et un), la corde au cou. Il avait dit-on, tenté de s’évader.  

Le secrétariat du service de travail de Melk choisit dans quel kommando les détenus vont aller. Jean Varnoux  se trouve successivement dans de nombreux kommandos de travail, notamment dans les kommandos de M. Franz Sdraule, architecte municipal de Melk (l’abbé estime qu’il est “un homme droit et bon”): ainsi J. Varnoux travaille par exemple dans une carrière de sable, participe à la construction du crématoire, de la cuisine, d’une station de pompage…

Les alliés avancent. Himmler donne l’ordre d’exterminer les détenus. Ludolf fait donc miner l’entrée de la mine et veut la faire exploser après avoir enfermé à l’intérieur l’ensemble des détenus. Heureusement, le S.S. doit finalement annuler son coup: grâce à l’intervention de Josef Sora, docteur du camp, le sous-préfet de Melk a demandé à son supérieur de faire pression sur les dirigeants du camp central de Mauthausen. Il est décidé que les détenus soient évacués vers Ebensee. L’opération, prévue pour la semaine suivante, concerne 10000 personnes.

Colonne de déportés dans la cour d’appel

Cheminée du crématoire

Tunnel des déportés

Place d’appel (1947-1948)

Rampe d’accès au block des déportés

Vue sur le Danube et l’abbaye de Melk (1947-1948)

Vue générale du camp (1949). A l’arrière-plan : la cheminée du four crématoire

Vue du camp de Melk (1947-1948)